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Abancay // Puno - Pérou

  • Les socquettes légères
  • 25 juin 2016
  • 6 min de lecture

Faisons-nous plaisir, parlons politique pour "s'ambiancer". Brexit ? Bof. Le 5 juin dernier, la nation péruvienne a élu le candidat de droite Pedro Pablo Kuczynski (PPK) président de la République. Il a devancé de justesse la populiste Keiko Fujimori, fille d'Alberto Fujimori, ancien président du Pérou et condamné à 25 ans de prison pour crime contre l'humanité, violation des droits de l'homme, détournement de fonds publics, corruption, établissement d'un programme de stérilisation forcée contre 300 000 Amérindiennes. Voilà voilà, Keiko remercie son papa pour cette défaite, et vous, avec ces quelques lignes, vous nous gratifiez d'une ambiance de blog digne d'une soirée en garde à vue.

Objectif Cuzco, distance à parcourir 570 km, 5 cols à franchir, chaque montée s'étire sur environ 40 km, les descentes idem, le plat se fait très rare. On a presque envie d'y aller mais ça nous prendrait 12 jours, c'est trop long, on prend un bus. Devenus quelque peu "psyclepath" depuis nos premières ascensions, on se laisse tout de même 200 km, 2 cols et 4 jours de vélo pour atteindre la capitale des Incas.

Globalement et malgré la difficulté des montées ce parcours nous est apparu beaucoup moins éprouvant que ce que nous avions vécu entre Ica et Ayacucho.

Pourquoi ? La route est en velours et la distance moins importante. Une nouvelle facette des Andes s'est offerte à nous, moins âpre, avec des villages charmants et vivants. L'altitude comprise entre 2800 et 4000 ne nous inflige plus de maux de tête. Le climat est clément. Nous pouvons mieux dormir et manger, caramba !

Et puis une route bordée d'une terre riche où l'orge, le quinoa, la pomme de terre et l'anis flirtent, ça n'a rien de sinistre. Une trajectoire parfumée aux orchidées et eucalyptus, ce n'est pas franchement atroce. Les colibris qui barbouillent nos yeux d'invraisemblables couleurs, on peut s'y résigner.

Loin de ces contingences, les paysages, eux, s'entêtent à déplier leur majesté.

Claire aimerait rejoindre le Ministry of Silly Ride - catégorie vélo -, un dérivé du Ministry of Silly Walks des Monty Python.

Depuis Abancay, accéder à Cuzco - "nombril du monde" en langue Quechua - nous a malgré tout réservé quelques difficultés. Lors du premier jour de bécane, à la suite d'une journée de grimpe, nous avons passé un col à 4 300 m sous les draps roses du crépuscule, "oh, c'est beau, mais ça meule sacrebleu !" Le froid fixé sur nos carapaces, l'idée du camping recalée, le noir nous réduisant à de pauvres contours, la descente s'annonce longue, trop longue.

Assurés de trouver un logement rapidement selon les dires des Péruviens rencontrés sur la route, nous avons finalement été contraints de faire 30 bornes et 1 h 30 de biclou "dans la nuit noire et obscure", entre camions et chiens ameutés. Et puis, au moment où l'angoisse devient le seul repère, le soulagement jaillit lorsque nous trouvons un hébergement accolé à une station-essence...

Un petit mot sur le meilleur ami de l'homme : le chien. C'est une fumisterie, en tout cas, ici, dans cette vallée maudite, où une cinquantaine de cabots ont craché leur bave sur nos socquettes avec l'espoir de mordre. Se faire pourchasser par les chiens errants est une constante du voyage à vélo, mais là, c'était vraiment la fête des crocs.

"Tout au fond là-bas, oh oh il y'a quelqu'un ?!, levez-vous s'il vous plaît, merci", le Nevado Salcantay (6271 m) reluque notre bivouac à la fraîche.

Vomi ? Mal d'altitude ? Non, omelette.

Mais qui sont les Péruviens ? Métis pour 45 % d'entre eux, c'est-à-dire d'origine à la fois amérindienne et européenne. La population indigène établie dans les Andes compte pour 35 à 45 % de la démographie. Sans oublier les nombreuses minorités situées dans les régions amazoniennes.

Faisons de l'anthropologie de comptoir. Dans les montagnes les caractères nous ont semblé plus revêches que sur la côte métissée. Plutôt logique, le climat, l'environnement, tout ça. Les premières phrases échangées se passent très bien de sourires et de manières, le regard est sévère mais très rapidement générosité et honnêteté s'affirment, la bonté s'installe, les rictus se dévoilent, on sort le pisco et on chante du Patrick Sébastien, ou presque.

D'ailleurs, Patrick Sébastien soulève un sujet sensible (comme souvent), la télévision. Les Péruviens ont un sérieux problème avec cette machine. Constamment allumée, éteignant toute conversation, irradiant tous les espaces murés, la qualité des programmes n'a pas franchement l'air d'éclairer les consciences.

Le tricot c'est mieux, ça donne le sourire.

Mais que mangent les Péruviens ?

Le ceviche, poisson cru coupé en morceaux et mariné dans du jus de citron vert, servi avec des épices, des oignons et une patate douce, super bon.

Sinon le filet de boeuf (lomo saltado) sauté à la poêle avec oignons, tomates, frites et riz ou encore le poulet rôti et les cochons d’Inde « cuy » (prononcé « couille ») sont également très populaires. Nous n’avons pas mangé de « couilles ».

Les petits cochons d'Inde "trop mignons tout plein" se font cuire dans un four comme celui-ci.

Nous avons aimé les soupes, les empanadas, les avocats, les pommes de terre fourrées, la chicha morada, le riz au lait, la cancha...

Précisons qu’on nous a servi quelques très bons foutages de gueule où les frites quasi crues dégagent un parfum d’huile rance recouvrant une viande nerveuse et parfaitement sèche secourue par un riz d’une fadeur insurmontable. Merci beaucoup.

 

"T'es allé au Machu Picchu ? Comment t'as fait ?" Ces questions sont récurrentes chez les touristes fraîchement arrivés à Cuzco.

Deux options :

- Depuis Cuzco en train, 160 $ A/R sur la journée, classe expédition (la plus économique), 3 h de trajet jusqu’à Aguascalientes soit 1,4 $ au kilomètre (115 km) plus cher que le Lille-Paris ! Oui, ça existe, chantons No limit de 2 Unlimited pour se détendre. Puis prendre une navette à 19 $ A/R pour monter jusqu’au site proprement dit. Droit d’entrée sur le site : 44 $

Total des réjouissances : 223 $ par tête.

- Depuis Cuzco en bus, 20 $ A/R sur deux jours ou trois jours, 6 h de trajet dont 2 h sur piste à flanc de montagne. Puis marcher 2 h 30 sur la voie ferrée jusqu’à Aguascalientes (accessible uniquement en train ou à pied), regarder le train passer… Se loger et se nourrir pour environ 30 $ (1 nuit). Se réveiller à 4 h du matin, marcher 1 h 30 pour atteindre le site au lever du soleil, payer son droit d’entrée à 44 $, un grand sourire sous les cernes.

Total des réjouissances : 84 $ par tête.

On a opté pour la marche à pied.

"C'est loin mais, c'est beau" aurait déclaré notre bien-aimé Jacques Chirac, amoureux des civilisations anciennes. Le site naturel du Machu Picchu est "ouf chanmé", les ruines sont remarquablement conservées, on prend une bonne leçon d'ingéniosité technique et d'organisation sociale et politique. Et puis ce granite, "comment qu'il est bien taillé dis donc".

Cuzco, ci-dessous le Monasterio de Santo Domingo construit en lieu et place du temple du Soleil de l'Empire inca. Des plafonds aux murs, ce temple était entièrement couvert d'or. Lorsque les Espagnols découvrirent le beau cadeau, ils s'empressèrent de tout piller, de fondre le métal précieux et d'envoyer les lingots à la couronne d'Espagne. Une fois dévasté, les dominicains utilisèrent les fondations incas pour élever leur monastère.

C'est un peu court, mais c'est grosso modo le mode opératoire des premiers colons au Pérou et plus largement en Amérique du Sud. Bien sûr, le massacre et l'exploitation - notamment avec les mines - des peuples indigènes vont de pair avec la mise à sac du sous-continent américain.

Sinon Cuzco, c'est très beau.

Nous logions dans un relai accueillant les cyclo-randonneurs all over the world, chouettes rencontres, chouette ambiance. Depuis, nous ne cessons de rencontrer des cyclo, pour notre plus grand plaisir.

Sur la route du lac Titicaca, après une longue journée de vélo, on a piqué une tête dans ces sources d'eau chaude sulfureuse titrant à 40°C.

Le lendemain matin, on a pris cette photo.

Puis, on a fait du vélo.

Jusqu'à Puno situé sur l'Altiplano.

On doit ce lyrisme et ces quelques rimes finement ciselées à une étude intensive de La poétique d'Aristote.

Puno donc, ville quelconque bordant un sublime lac, le Titicaca. 190 km de long sur 80 km de large, 3812 m d'altitude, la longueur totale de ses rives s'enroule sur 1125 km, bref, des stats aussi impressionnantes que celles de Dimitri Payet. On vous laisse admirer le(s) bleu(s).

Nous sommes actuellement à La Paz en Bolivie, au repos, la boule au ventre avant d'attaquer le salar d'Uyuni et le Sud-Lipez. On vous embrasse.


 
 
 
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